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J'ouvris de nouveau les yeux. Ah oui c'est vrai. Je n'étais pas chez moi mais dans ma voiture. Je me redressai en grimaçant à cause de mes côtes et de mon mal de tête qui venait de débarquer. Je déverrouillai et sortis.
- Qu'est-ce que tu veux ?
- Ta voiture gêne. Kevin veut sortir, me dit Peter.
- Débrouille-toi, répliquai-je en lui donnant mes clés.
J'entrai dans la maison. À mon grand étonnement, il y avait pas mal de monde de réveillé. Je fouillai le salon du regard mais je ne voyais pas Jess. J'avais eu le temps de dessouler, de dormir, mais même si j'étais toujours en colère, je voulais voir si elle allait bien. J'allai voir dans la cuisine, puis dans la salle de bain, mais elle n'y était pas.
- Hé, t'as pas vu Jess ? demandai-je à un gars qui passait devant moi.
- Qui ?
- Jess.
- C'est qui ?
- Ok, laisse tomber.
Je continuai mes recherches en ouvrant les portes une par une. Quelle idée d'avoir une maison aussi grande ! Je me suis excusé en ouvrant la porte d'une chambre puisqu'un gars était en train de remettre son pantalon. Mais à peine la porte refermée, je l'ai rouverte, ce qui a fait râler le mec.
- J'étais pas sûr que c'était toi, lançai-je à Cam qui était couchée dans le lit. Finalement, tu as trouvé quelqu'un d'autre ! ris-je en claquant la porte.
Le gars sortit juste derrière moi et grognait tout seul. Je crois bien que mon interruption l'avait énervé. J'ouvris la chambre d'à côté pour voir un autre couple, endormi dans le lit. J'allais refermer quand j'ai reconnu Jess, et mon sourire disparu. Elle était toujours habillée comme hier soir – et heureusement ! – mais son bras reposait sur le torse du gars à côté d'elle.
On était dimanche soir et j'étais chez Flo. Avec Thibault, on était en pleine partie de Xbox et mon copain était dans la chambre.
- Il fait toujours la gueule ? me questionna mon ami.
- Ouais.
Il ne m'avait pas adressé la parole depuis notre engueulade de vendredi soir. Tout ça parce que j'avais frappé Mylène à sa place. Je n'allais tout de même pas le laisser frapper une fille, il allait s'en prendre plein la gueule. D'ailleurs, je n'avais pas l'intention de la frapper, mais sa dernière remarque m'avait fait sortir de mes gonds.
Le pire dans tout ça, c'est qu'il a voulu se venger en allant danser avec des filles. Même si ça me mettait hors de moi et que ça me rendait incroyablement jalouse, je n'ai rien laissé paraître. Je lui cachais mes émotions quand on s'engueulait. Je savais qu'il détestait ça, alors j'en profitais. Et puis, je n'allais pas lui donner la satisfaction de démarrer une nouvelle dispute.
Néanmoins, ce que je ne comprenais pas, c'était qu'il faisait la gueule à Thibault aussi. Et à un peu tout le monde en fait…
- Bon, moi j'y vais, décida Thibault en posant la manette. Toi, va te réconcilier avec ton amoureux.
- S'il veut qu'on s'explique, c'est lui qui viendra.
- Le problème c'est que vous êtes aussi bornés l'un que l'autre. Comment veux-tu que ça avance ?
- Ça avancera quand il se bougera le cul.
- Jessie chérie, tu parles de plus en plus mal !
Il a éteint le jeu et s'est levé pour partir. J'ai pris sa main pour qu'il se rassied.
- Non, reste, le suppliai-je.
- Tu veux que je reste seulement parce que tu te fais chier.
- Et tu es venu seulement parce que tu te faisais chier, je te rappelle.
Il m'embrassa sur la joue en riant et se dirigea vers la porte.
- Va le voir, m'ordonna-t-il. Tu l'aimes, il t'aime, c'est l'amour fou entre vous. Je reviendrai quand je recevrai un message me disant que c'est de nouveau la joie. Bonne nuit !
Et il claqua la porte après m'avoir fait un grand sourire, me laissant comme une imbécile. J'ai remis le jeu en route pour démarrer une partie seule.
Je n'avais pas envie d'aller le voir. C'était lui qui faisait la gueule, c'était à lui de venir vers moi.
Comme s'il avait attendu le départ de son meilleur ami, Flo sortit de la chambre et se mit au bar pour manger ce que j'avais préparé pour Thibault et moi. J'avais fais exprès d'en faire assez pour lui aussi. Je ne lui parlais plus mais quand même, je pouvais le nourrir. C'était moi qui logeait chez lui, je n'allais pas le laisser mourir de faim.
Tout en jouant, je lui jetais quelques coups d'œil. Il était dos à moi, à ma place de d'habitude – je le soupçonnais d'ailleurs de l'avoir fait exprès pour pas me voir - , torse nu et en short. Il n'aurait pas pu s'habiller un peu au lieu de me tenter comme ça ! Je voulais me précipiter dans ses bras et l'embrasser partout en m'excusant, mais ma fierté m'imposa de rester posée sur le canapé et d'attendre. Et c'était ce que je faisais.
Il n'avait pas mit son bandage, alors qu'il en avait encore besoin. Mais je le comprenais puisque moi non plus je ne le mettais plus. C'était gênant ce truc.
Après manger, Flo s'est levé, a déposé son assiette dans l'évier et est retourné dans sa caverne avec un paquet de chips. Et sans me jeter un regard bien sûr, ni m'adresser la parole. Je n'avais pas entendu sa voix depuis vendredi soir tout de même ! Même cette nuit, il s'était couché dos à moi. Sans un bisou, sans un câlin. Je ne comprenais pas pourquoi il était aussi fâché contre moi.
Je mis le jeu sur pause et pris mon téléphone pour envoyer un message à Thibault.
' Je me fais chier ! Reviens ! '
' Trop tard, je suis déjà très loin chérie. Alors que Flo est dans la pièce à côté. C'est plus pratique d'aller le voir lui. '
' Je n'ai pas envie d'y aller… '
' Si, tu en as envie. Il ne va pas te repousser, il n'attend que ça. Et toi aussi. Tu es trop têtue ! '
' Je sais. '
J'ai attendu quelques minutes pour voir s'il allait me répondre, mais il ne le fit pas. Il avait raison, j'avais envie d'aller le voir… Et j'allais y aller, tant pis pour ma fierté.
J'ouvris la porte de la chambre et Flo était couché sur le lit, un livre à la main et un paquet de chips dans l'autre. La première fois que je l'avais vu lire, ça m'avait fait bizarre mais je m'y était habituée. Je lui avais même conseillé quelques livres. Celui qu'il lisait en faisait parti.
J'ai refermé la porte derrière moi sans qu'il ne me regarde. Rien que ça, ça me donnait déjà envie de ressortir en l'insultant. J'ai toutefois pris mon courage – et ma patience – à deux mains et je me suis rapprochée du lit. J'ai pris le paquet de chips pour le poser sur la table de nuit et me suis couchée contre lui, en prenant son bras pour le passer autour de mes épaules. Tout ce que j'ai obtenu comme réponse, c'est le mouvement de sa main tournant la page de son livre. J'avais l'impression de manipuler un patin et il m'énervait à m'ignorer comme ça ! J'allais donc l'énerver encore un peu.
Je relevai la tête pour le fixer. Il continuait de lire mais sa mâchoire se contractait, ce qui signifiait que j'avais atteint mon but. Je ne pus me retenir de l'embrasser sur la joue en souriant. Il avait beau m'énerver, il restait craquant et irrésistible.
Comme il ne faisait toujours rien, j'ai pris son livre et l'ai posé sur la table de nuit, en prenant soin de remettre le marque page avant. Je détestais quand je perdais ma page en pleine lecture donc je ne le faisais pas subir aux autres. Ce serait une vengeance bien trop cruelle, même pour lui !
Il avait les yeux fermés, sûrement pour se contenir et ne pas lâcher prise. Mais il n'y arrivera pas. Je me suis mise sur lui et j'ai déposé quelques baisers sur son torse. Il gardait toujours les yeux clos et ne faisait rien. Je baladai ma langue jusque dans son cou, avant d'aspirer sa peau pour lui laisser une marque. Il poussa un petit soupir et ses mains se sont enfin posées sur mes hanches. Comme je le pensais, il n'aura pas mit longtemps pour craquer. Sa main gauche détacha mon chignon et mes cheveux tombèrent sur son visage. Il posa ses mains sur mes joues pour me regarder dans les yeux, pour la première fois en deux jours.
- Lâche-moi.
Je secouai la tête. Il n'était pas question que je m'en aille.
Ses mots ressemblaient plus à une supplication qu'à un ordre, et je voyais la lueur de désir si familière brûler dans ses yeux. Il ne voulait pas que je le laisse. Il me voulait autant que je le voulais. J'approchai mes lèvres tout proche des siennes, sans pour autant les toucher. Ce sera lui qui m'embrassera.
- Tu m'énerves, souffla-t-il contre ma bouche.
- Toi aussi.
Je l'embrassai sur la joue.
- Tu es insupportable.
- Toi aussi.
Je l'embrassai sur l'autre joue. Il me fixait, ses mains toujours sur mes joues. Je me redressai et ses mains retombèrent sur mes cuisses.
- Mais tu m'aimes quand même non ? lui demandai-je en mordant ma lèvre inférieure.
- Tu ne t'imagines même pas à quel point…
Il me bascula sur le côté et posa enfin ses lèvres sur les miennes. Une décharge électrique parcouru tout mon corps en un rien de temps. Ça semblait faire une éternité alors que ça ne faisait que deux jours ! Il m'était devenu indispensable, vital. Deux sans lui c'était beaucoup trop long. Je n'aurais pas supporter qu'il me repousse réellement.