Chapter 58
1329mots
2022-10-21 04:25
58
Elle se redressa péniblement pour s'asseoir. Je voulus me mettre debout mais ma jambe me lança ce qui me remit à terre. Je n'étais qu'à deux mètres d'elle et je me trainai donc près d'elle. Je pris son visage entre mes mains mais elle les rejeta pour inspecter le mien.
- Ça va ? me questionna-t-elle.

- Et toi, ça va ?
- Pourquoi tu n'es pas resté dans la voiture ? Pourq…
- Tu n'as pas cru que j'allais te regarder te faire défoncer non plus ? m'écriai-je.
- Si, tu aurais dû. C'est moi qu'ils voulaient, pas toi.
- Comment ça ?
Elle me regarda d'un air désolé. Ses mains tombèrent au sol et ses yeux esquivèrent les miens. Je lui relevai la tête pour pouvoir la regarder.

- Bébé regarde-moi. Regarde-moi Jess. Ça va aller d'accord ?
Je toussai et crachai à nouveau du sang.
- Je suis désolée Flo, s'excusa-t-elle les larmes aux yeux. Pardon.
Des sirènes de pompier se firent entendre tout près. Pour la première fois depuis la bagarre, je levai les yeux pour voir qu'on était encerclé de plusieurs jeunes. Certains se tenaient les mains, d'autres pleuraient – je ne savais même pas pourquoi - , d'autres encore prenaient des photos. Ils n'avaient que ça à foutre ces imbéciles !

Mathilde était accroupie près de nous et pleurait en tenant la main blessée de Jess.
Ma vision se troublait de plus en plus. Jess posa sa tête contre mon torse et je la tenais dans mes bras. Elle était mal en point. Son visage était plein de sang, tout comme sa main. Elle avait dû en frapper plus d'un. Je lui chuchotais des mots incohérents à l'oreille. Je ne savais même pas si elle m'entendait mais c'était plus pour la réconforter, ou me réconforter moi-même. Je n'en savais rien.
Elle se dégagea de mes bras et voulut se mettre debout mais je la retins.
- Jess arrête.
- Lâche-moi. Je vais bien.
- Mais bien sûr. Calme-toi s'il te plaît, soupirai-je.
- Non, je vais les retrouver et tous les tuer.
Elle se dégagea complètement et se mit debout difficilement. Je fis de même et je l'ai retenu par la main alors qu'elle commençait à partir. Elle devenait dingue.
- Lâche-moi ! me cria-t-elle. Je veux aller les retrouver !
- Ok. Je viens avec toi alors, lui répondis-je sincèrement.
J'étais à moitié dans les vapes mais je savais qu'on ne nous laisserait pas partir. Des voitures de police et des camions de pompier arrivaient. Ils n'auraient pas pu arriver quelques minutes avant non ?
Deux hommes ont accouru vers nous et Jess s'est débattue – enfin, elle essayait – mais elle a abandonné voyant que c'était peine perdue. Elle était trop épuisée. On se dirigea vers le camion le plus proche et on nous posa plusieurs questions. Où est-ce que vous avez mal ? Que s'est-il passé ? Où sont-ils partis ? Pourquoi s'en sont-ils prit à vous ? Qui sont-ils ? Je tentais de répondre du mieux que je pouvais mais c'était assez compliqué. Entre mon mal de tête intense, ma vision qui se troublait et Jess qui grognait qu'elle voulait aller leur arracher la tête, je n'avais qu'une envie, s'était de m'endormir.
Au bout de dix minutes, les pompiers ont accepté qu'on monte dans le même camion. C'était hors de question que je laisse Jess toute seule. Mais j'aurais peut-être pas dû parce qu'elle m'a prit la tête tout le trajet.
- Qu'est-ce qui t'as pris de venir ? grogna-t-elle une fois les portes du camion fermées.
- Ils étaient six, j'allais pas te laisser seule !
- Parce que tu as cru qu'à deux contre six ça allait mieux le faire peut-être ? s'écria-t-elle.
L'entendre crier pendant une dispute était un signe flagrant de colère intense chez Jess et s'engueuler avec elle quand elle était énervée était suicidaire, mais je n'avais pas le choix. Elle me gonflait en ce moment et je n'allais pas la laisser me crier dessus.
- C'est toujours mieux que de te laisser seule !
- N'importe quoi !
- Ah oui c'est vrai que tu avais l'air de bien t'en sortir ! lançai-je ironiquement. Tu t'es regardée dans un miroir une seconde ?
- Les jeunes, calmez-vous s'il vous plaît, s'interposa le flic qui était dans le camion avec nous.
Le pompier s'occupait du visage de Jess quand elle repoussa sa main pour s'adresser à moi.
- Je m'en fous de moi ! J'ai l'habitude contrairement à toi.
- Tu avais l'habitude ! Ce n'est pas la même chose ici ! m'exclamai-je, hors de moi.
- Tu ne t'es même pas remis de ce week-end ! contra Jess avec violence.
- Et alors ? Je devais te regarder te faire tuer ?
- C'était après moi qu'ils en avaient, pas après toi !
Voilà où je voulais en venir.
- Qu'est-ce que tu en sais ?
- Parce que je le sais, c'est tout, se renfrogna-t-elle.
Elle était redevenue calme d'un seul coup et ne me regardait plus.
- Tu sais pourquoi ils étaient là, pas vrai ?
- Non.
- Ne me mens pas Jess. Tu t'es excusée en disant que c'était de ta faute, expliquai-je.
- J'ai parlé sans réfléchir.
- Vas-y continue ! criai-je en balançant la compresse que je tenais sur mon œil.
- Monsieur, calmez-vous, se répéta le flic.
- Non ! Elle me ment et je n'aime pas ça ! Elle sait pourquoi ils étaient là et je veux le savoir aussi !
Elle me jeta un regard noir.
- Vous avez dit que vous ne les connaissiez pas, reprit le flic en s'adressant à Jess. Est-ce la vérité ?
- Oui.
- Donc vous n'avez aucune idée de la raison de cette bagarre ?
- Non.
Si elle continuait à s'obstiner de la sorte, j'allais vraiment péter un câble.
- Mais elle ment ! Putain Jess dit-le moi !
- Je t'ai dis que je n'en savais rien !
- Te fous pas ma gueule ! Dès que tu les as vu, t'as posé ton sac et t'as foncé dans le tas. Et tu viens de dire qu'ils en avaient après toi. Tu t'enfonces, alors arrête tes conneries.
On se regardait silencieusement dans les yeux quand le pompier ouvrit la porte du camion pour sortir. Il descendit suivit du flic et Jess se précipita pour descendre. Il l'emmenèrent dans une pièce pour la soigner et moi dans une autre.
Un médecin m'a recousu l'arcade, a terminé de désinfecter mes plaies au visage et à la main. Il m'a ensuite fait passé des radios de la main et du torse. Mes phalanges étaient seulement ouvertes mais j'avais deux côtes fêlées. Je lui ai aussi dis que je voyais vraiment trouble de l'œil gauche et il l'a examiné. D'après lui, se serait seulement dû au sang qui avait coulé de mon arcade jusque dans l'œil et ça passerait dans quelques heures. Il m'a donné un médicament pour calmer ma douleur et je lui ai demandé où était Jess.
- Il faut vous reposer monsieur.
Il me fit signe de m'allonger mais je ne le fis pas.
- Je n'ai pas besoin de me reposer, je veux la voir.
- Elle va bien. Ses blessures sont superficielles, comme les vôtres. Elle n'a rien de grave.
- Je m'en fiche, je veux la voir.
- Reposez-vous.
- D'accord, soufflai-je.
Je me suis couché sur le lit le temps qu'il parte, mais j'ai quitté la pièce une fois seul. Mes côtes me faisaient souffrir mais il fallait que je la trouve. J'ai ouvert quelques portes et me suis fait insulter une ou deux fois. La quatrième porte était la bonne. Elle était seule et semblait sur le point de partir puisqu'elle enfilait difficilement ses chaussures.
- Tu ne devrais pas être couché ? me demanda-t-elle sans même me jeter un regard.
- Et toi ? Qu'est-ce que tu fais ?