18
J'ouvris les yeux et regardai autour de moi. Flo n'était plus vers moi et j'étais sur un sol froid en pierre, dans une toute petite pièce. Il n'y avait qu'un matelas juste à côté de moi. Les murs étaient gris et il n'y avait pas de fenêtre. Juste une porte en bois sale. Avec un verrou. Je fouillais ma mémoire pour essayer de me rappeler où j'avais déjà vu cette pièce. Je savais que j'étais déjà venue. Et je me suis souvenue. J'avais passé deux mois dans cette pièce il y a trois ans, et j'étais de retour. Ou alors je n'étais jamais partie et tout ce que j'avais vécu n'avait été qu'un rêve.
J'entendis le verrou tourner et la porte s'ouvrit sur l'homme qui était la cause de tout. La cause de mon renfermement. De mon manque de confiance envers les gens qui m'entourent. De mon dégout de moi-même. De ma peur irréfutable de dormir. Il me fixait de ses yeux noirs et me souriait. C'était un sourire victorieux et vicieux. Je me levai et le fixais à mon tour et le regardai droit dans les yeux. En masquant mes émotions, comme il me l'avait appris. Pourtant, il savait qu'il me faisait peur.
- Je t'avais dis que je reviendrais te chercher.
Ça y est. Je comprends. Il m'avait promis qu'il me récupèrerait il y a trois ans. Quand il m'a laissée partir. Et il a réussit. Je suis revenue au point de départ. Je suis de retour en enfer.
- Qu'est-ce que tu me veux ?
Ma voix ne tremblait pas et restait neutre.
- Te proposer un petit marché.
Il me tendit un pistolet. Je le pris et le regardais, me demandant ce que je devais en faire. Il sortit de la pièce et réapparut quelques secondes après en jetant quelqu'un par terre. L'homme à terre avait les mains attachées dans le dos et un morceau de scotch sur la bouche. Il était dans un sale état. Il leva les yeux vers moi. Des yeux bleus que je ne connaissais que trop bien. Ceux de Flo. Ils étaient rouge et brillant de colère. Il était blessé de partout au visage. Son nez et son arcade sourcilière saignaient et quelques bleus commençaient déjà à apparaître sur son beau visage. Des larmes roulaient sur mes joues et je tombai à genoux. J'ai voulu le prendre dans mes bras mais l'autre homme dans la pièce me pointait un autre pistolet sur la tempe, alors je me suis arrêtée.
- Le marché est le suivant. Soit tu reviens avec nous, et je renvoie ton chéri chez lui, soit tu repars chez toi sans une égratignure mais tu devras le tuer.
Non, pas ça ! Ne me demande pas ça ! N'importe qui mais pas lui. C'est le seul à qui je tiens. Le seul qui semble se préoccuper de moi. Le seul… Je me levai et voulu frapper cet homme méprisable, mais il était plus fort que moi, alors il m'attrapa facilement par le bras et me fit tomber au sol. J'essuyai mes joues et relevai la tête.
- Tue le.
- Non.
Je jetai un coup d'œil à Flo. Le pauvre, il se retrouvait là-dedans et ne comprenait rien à ce qu'il se passait. Tout est de ma faute. Il se retrouvait dans cette histoire à cause de mes problèmes.
- Alors reviens avec nous.
- Jamais.
- Si tu ne te décides pas, je choisirai à ta place. Je le tuerai moi-même et tu resteras avec nous.
Je ne pouvais pas réfléchir. Je n'y arrivais pas. Alors, sans m'en rendre compte, je ramassai l'arme qui était tombée, me levai et la pointai sur lui. Ses yeux m'imploraient. Ses magnifiques yeux bleus. Une larme coula sur sa joue. Sur la mienne aussi. J'entendais presque sa voix dans ma tête qui me suppliait de ne pas le tuer. Je regardais au plus profond de ses yeux. De son âme. Je le fixais. Je ne pouvais pas détourner le regard. Je le fixais. Intensément. Et je tirai.
Je me suis réveillé dans la nuit mais Jess n'était plus avec moi. Il faisait encore nuit et elle était déjà levée ?
La porte de ma chambre était ouverte et je ne voyais pas de lumière dans le salon. Je regardai l'heure et vis qu'il était presque quatre heure du matin. Qu'est-ce qu'elle faisait debout à cette heure là ? Je veux bien qu'elle se lève tôt mais de là à se réveiller en pleine nuit, il y a des limites.
Je me levai donc et vis de la lumière qui passait sous la porte de la salle de bain. Je toquai à la porte.
- Jess ?
Pas de réponse. Je retapai à la porte.
- Jess, ça va ?
Toujours pas de réponse. J'ouvris la porte doucement et je la vis en face du miroir, les mains appuyées sur le lavabo, la tête baissée.
- Jessica ça va ?
Je me répétais mais elle ne semblait pas m'entendre. Qu'est-ce qui lui arrivait ? Je commençais vraiment à m'inquiéter. Je m'approchai et posai ma main sur son dos.
- Non !
Elle s'est retournée en criant et dégagea ma main en frappant mon bras. Elle recula jusqu'au mur et me regarda effrayée. Son visage était trempé de sueur et elle avait peur. Très peur. Je le voyais dans ses yeux pour une fois. Elle tremblait de partout et des larmes maculaient ses joues.
- Jess, c'est moi, lui dis-je doucement en m'approchant.
- Non ! Ne t'approches pas !
Je m'immobilisai un instant pour lui laisser le temps d'assimiler la situation et continuai lentement d'avancer. Arrivé à sa hauteur, je tendis le bras et posai ma main sur sa joue. Ses yeux rouges et bleus étaient rivés aux miens et j'essuyai doucement sa pommette à l'aide de mon pouce. Elle ne me repoussa pas alors je la pris dans mes bras et la laissai pleurer contre moi. Elle avait dû faire un cauchemar. Mais les cauchemars ne sont pas censés être aussi violents, si ?
Je lui caressais les cheveux en lui répétant « Ça va aller. Tout va bien. C'est finis. « . Je ne savais même pas si elle m'écoutait. Je sais que ces mots sont stupides et peuvent paraitre insignifiants dans certaines circonstances, mais je ne savais pas quoi dire d'autre.
On est resté plusieurs longues minutes comme ça. Sans bouger. Le temps qu'elle se calme.
- Je suis désolée, murmura-t-elle.
- C'était un cauchemar ?
Elle hocha la tête. C'était vraiment une question à la con.
- Je suis désolée, répéta-t-elle.
- Tu t'excuses parce que tu as fais un cauchemar ?
Nouveau hochement de tête. Je me reculai et pris son visage entre mes mains pour qu'elle me regarde dans les yeux.
- Tu n'as pas à t'excuser d'avoir fait un cauchemar, lui expliquai-je.
- Si. Parce que je t'ai tué, avoua-t-elle après quelques secondes de silence.
Je voyais une peur immense dans ses yeux. Et de la tristesse. Beaucoup de tristesse. Je me baissai un peu pour la porter jusqu'à mon lit. Je l'allongeai et la couvris mais elle se redressa immédiatement.
- Je ne veux pas me rendormir.
- Je reste avec toi, ne t'en fais pas. Je te réveillerai si tu commences à t'agiter. Dors, je suis là.
Elle hocha la tête et se recoucha en fermant les yeux. Je m'allongeai à côté d'elle et la pris dans mes bras.