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- J'ai juste… Fais ce que… Ce qu'elle m'a demandé…
Je m'accroupis à côté de lui et il prit peur puisqu'il s'éloigna de moi. Le mur l'arrêta et il était assis, dos à celui-ci. Sa respiration était très forte et rapide. Il essayait probablement de rassembler le plus d'air possible avant que je ne l'étrangle de nouveau.
- Puisque tu es son petit chien, tu lui rapporteras tout ce qu'il s'est passé et tu lui diras au passage que si je revois ne serait-ce que la couleur de ses cheveux, il lui arrivera pire que ce qu'il s'est produit ici. C'est compris ?
En guise de réponse, il me cracha au visage. Je lui souris, m'essuyai le visage et me relevai. Puisqu'il n'y avait qu'un seul moyen pour qu'il coopère, j'allais recommencer. Je posai mon pied sur son entrejambe, sûrement déjà un peu meurtri, et appuyai très légèrement. Seulement pour lui faire peur. Et ça marchait, puisqu'il me regardait terrifié.
- Je t'ai demandé si c'était compris.
- Oui, grogna-t-il.
- J'espère. Parce sinon tu pourras dire adieu définitivement à la partie de ton corps qui te sers le plus.
J'enlevai mon pied et le laissai dans la ruelle. J'ignorai ce qu'ils comptaient me faire tout les trois. Seulement me frapper ? Ou plus ? En tout cas, s'ils pensaient que je ne riposterais pas, ils s'étaient bien trompés. Ils n'étaient pas tombés sur la bonne personne. Mylène était donc incapable de se venger par elle-même. J'espérais pour elle que je ne la reverrai jamais
Je me dirigeai vers chez Flo mais je m'arrêtai en chemin dans le parc pour attendre que ce soit l'heure pour lui d'aller travailler. Je ne voulais pas qu'il me pose cinquante questions à propos de mes blessures. Je ne savais pas encore ce que j'allais lui dire à ce propos. Tout sauf la vérité en tout cas.
J'envoyai un message rapide à Mathilde pour lui dire que je ne viendrais pas en cours l'après-midi parce que je voulais rester un peu avec mes amis que je n'avais pas vu depuis longtemps. Je n'aimais pas mentir, mais je n'avais pas trop le choix. Je n'allais pas me pointer en cours maintenant. J'étais trop amochée et trop en colère.
Dans la rue, les quelques personnes que je croisais me regardaient bizarrement. Je devais vraiment avoir une sale gueule. Je partis vers la fontaine à eau qui était dans le parc pour me laver un peu le visage. Je devais être la seule folle à vouloir me rafraichir le visage en plein hiver.
Finalement, j'avais bien fais d'accepter la clé de l'appartement de Flo. Sans cela, j'aurais été obligée d'aller en cours.
Arrivée chez lui, je me précipitai à la salle de bain pour me regarder le désastre qu'était mon visage. Ma mâchoire avait eu le temps de bleuir, ma lèvre était fendue et le sang avait arrêté d'inonder ma bouche.
Je pris ma brosse à cheveux pour les démêler et les attacher en chignon, pour qu'ils ne me gêne pas pendant que je me passerais du fond de teint sur le visage. C'était pour atténuer un peu la couleur mais je savais que ça se verrait toujours. C'était seulement pour diminuer la gravité de la situation quand Flo me verra. Il avait tendance à toujours en faire trop.
J'avais les mains au dessus de la tête, pour m'attacher les cheveux quand j'entendis le bruit de la serrure. Je regardai l'heure. Il était deux heure et demi, Flo devrait être au travail à cette heure ! Je poussai la porte de la salle de bain d'un coup de pied pour la fermer.
- Jessie ?
C'était la voix de Thibault. Qu'est-ce qu'il faisait là ?
- C'est toi ?
- Oui oui. Je… J'arrive ! lui criai-je.
- Oh putain !
Je tournai la tête pour le regarder entrer dans la pièce. J'avais donc mal fermé la porte… Ses yeux sortaient de leurs orbites et sa bouche était grande ouverte. Ce n'était pas si horrible que ça. Si ?
- Qu'est-ce que…
- Ce n'est rien, t'inquiète, le coupai-je.
- Mais non ce n'est pas rien ! T'as vu ta figure ? s'exclama-t-il en prenant mon visage en coupe dans sa main.
- Oui merci j'avais remarqué… bougonnai-je.
Je m'emparai de mon fond de teint mais il me le prit des mains.
- Tu t'es encore battue ?
- Non. Je me suis prit une porte dans la gueule au lycée, expliquai-je nonchalamment. Un gars ne m'avait pas vu et il…
- Arrête de mentir, m'ordonna-t-il méchamment.
- Je ne mens pas.
- Tu te fous de moi en plus.
Il prit ma main droite et la leva à hauteur de mon visage.
- Et ça c'est parce que tu t'es pris un mur ?
Merde. Je n'avais pas vu que la base de mes doigts avaient prit une teinte violette. Je n'avais rien sentis quand j'avais frappé l'autre dans le nez.
Thibault me fixait. Il guettait ma réaction. J'ai lu de la déception sur son visage. La déception que je lui ai mentis.
- Désolée, m'excusai-je.
- Tu t'es battue avec qui ?
- Des gars dans la rue, répondis-je vaguement.
Ses yeux s'agrandirent davantage.
- Des ? Ils étaient plusieurs ?
- Hum…
- Ils étaient combien Jessie ?
Je me décalai et le poussai un peu pour sortir de la pièce.
- C'est bon, lâche-moi s'il te plaît. Je n'ai pas vraiment la tête à ça pour l'instant.
Il me suivit dans la cuisine pendant que je me servais un verre d'eau. Il commençait déjà à m'énerver.
- Je m'en fiche que tu aies la tête à ça ou pas. C'était qui ces gars ?
- Je n'en sais rien, d'accord ? répliquai-je froidement.
- Il étaient combien ?
- Deux.
Ça paraîtra moins grave que si je lui disais qu'ils étaient trois. Il me jeta un regard interrogateur, alors je lui expliquai un mensonge improvisé.
- Bon, écoute. Je sortais de la pizzeria avec une amie et les gars ont voulu prendre notre argent. J'en ai frappé un au visage, et l'autre m'a frappé à son tour. On a réussi à s'enfuir. Elle est retournée au lycée mais je n'ai pas voulu y aller parce que j'avais une sale gueule. Voilà.
Un silence s'installa quelques instants avant qu'il ne prenne la parole. Heureusement, il semblait me croire.
- Tu les avais déjà vu ?
- Non.
- Si jamais tu les revois, tu me préviens immédiatement. D'accord ?
J'aquiescai et il me prit dans ses bras. Il se dégagea quelques secondes plus tard, m'embrassa la joue et me prit la main.
- Viens.
- Où ça ?
- Il faut que tu ailles porter plainte.
Je me dégageai immédiatement.
- Non ce n'est pas la peine. Et n'insiste pas, je n'irai pas.
Il ouvrit la bouche pour me répondre mais je l'interrompis.
- J'ai dis non. N'essaies pas de me persuader. Fin de la discussion.
Je m'installai sur le canapé, bien décidée à ne pas en bouger. Il se posa à côté de moi et souffla en marmonnant que je l'énervais. Je fis abstraction à ceci et lui demandai.
- Qu'est-ce que tu fais là en fait ?
Il se releva d'un coup et parti dans la chambre de Flo. Il avait complètement oublié la raison de son passage ici. Il était revenu avec un trousseau de clé. C'était les clés de je ne sais quoi qui servait pour son travail.
- Flo m'a demandé d'aller chercher ça avant que je parte le rejoindre, dit-il en jetant un coup d'œil à sa montre.
- Dépêche-toi tu vas être en retard.
- Non, je ne veux pas te laisser.
- Mais si, vas-y.
Je me levai et lui ouvrit la porte.
- Tu es sûre ? s'inquiéta-t-il.
- Oui. Aller dégage, ris-je.
- Appelle-moi s'il y a un problème et ne sors pas d'ici.
J'hochai la tête et il m'embrassa de nouveau sur la joue.
Une demie heure après le départ de Thibault, je répondis à un appel que j'attendais. Celui de Flo. Je savais que Thibault allait tout lui raconter et je savais aussi qu'il allait me téléphoner. J'aurais bien ignoré son appel mais il aurait débarqué dans la minute suivante.
- Je vais bien Flo, déclarai-je en décrochant.
- Tu es sûre ? Thibault m'a dit que c'était vraiment pas beau.
- J'ai déjà vu pire, lui assurai-je en souriant. Ne t'inquiète pas, ça va je te dis.
- Tu me le promets ?
- Oui.
Il soupira, rassuré.
- Donc ce n'est pas la peine que je vienne ?
- Si tu viens je m'enfuis en courant.
Je l'entendis rire à travers le téléphone.