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- Je te l'avais dis que c'était une mauvaise idée… articula-t-il difficilement.
- Tu as vraiment cru que c'était une bonne idée de te pointer chez moi pour me dire que t'aimais ma copine ? cracha Flo avec sarcasme.
Thibault écarquilla les yeux, surpris par ses propos. Quant à moi, je soupirai de lassitude. Flo n'avait absolument rien compris.
- Ta copine ? Attends, tu as cru que je parlais de Jessie ?
- De qui d'autre tu voudrais me pa…
- C'est pas Jessie, connard ! l'interrompit-il en criant. C'est Pauline !
- T'es vraim… Attends. Pauline ? répéta Flo, incrédule.
- Oui Pauline !
- Ma cousine ?
- Oui !
- Oh…
Il paraissait rassuré et désolé en même temps. Qu'est-ce qu'il pouvait être con et impulsif parfois !
Un nouveau silence se fit et Flo se détendit un peu. La suite s'annonçait plutôt bien finalement. Il ne pourra pas réagir de façon plus explosive qu'il ne l'avait déjà fait.
- Tu as vraiment cru que Jessie et moi…
- Ouais et bien vous me l'avez bien laissé croire aussi ! se justifia Flo tant bien que mal. Toujours collés l'un à l'autre à vous parler ou à vous envoyer des messages, ça n'aide pas vraiment…
- C'est trop mignon ! rigola son ami en reposant la serviette sur ses genoux. Tu es jaloux de moi mon petit ?
- Thibault, lui dis-je. Tu ne pourrais pas te la fermer un moment avant qu'il ne t'éjecte à travers la fenêtre ?
- Ce n'est pas con comme idée, répondit-il en souriant. Tu m'aurais laissé finir ma phrase aussi ! repprocha-t-il à mon copain.
- Je m'en fous.
Il partit à la cuisine pour prendre de la glace qu'il posa sur sa main, et s'assit sur un tabouret du bar. Il restait assez loin de Thibault, sans doute pour prévoir des quelconques représailles.
- Donc en fait, tu ne me croyais pas vraiment quand je te disais qu'il n'y avait rien entre nous, dis-je à Flo, un peu énervée.
- Si je te croyais. C'est juste que…
- C'est juste que quoi ? le coupai-je rageusement.
- J'ai démarré au quart de tour, d'accord ? Ce n'est pas parce qu'il ne se passait rien entre vous qu'il ne pouvait pas ressentir quelque chose pour toi.
- T'es vraiment trop con Flo ! m'écriai-je en levant les bras au ciel. Et même si c'était le cas, c'était une raison valable pour le frapper ?
- Ouais.
- Mais bien sûr…
- Bon, tu as finis chérie ? C'est moi qui était sensé me prendre la tête avec lui, pas toi, rétorqua Thibault.
- Je t'en pris, vas-y… soupirai-je en m'enfoncant dans le canapé.
Flo me regardait avec insistance.
- Tu peux nous laisser s'il te plaît ?
- Tu crois vraiment que je vais te laisser seul avec lui ? m'exclamai-je en riant.
- Il n'est pas en sucre non plus !
- Je reste, que ça te plaise ou pas, me renfrognai-je.
- C'est bon, fais ce que tu veux, capitula Flo en soufflant.
Je ne bougerai pas d'ici tant que ce problème ne sera pas réglé.
Un nouveau silence régnait dans la pièce. Flo regardait sa main, Thibault avait les yeux rivés sur la serviette tachée de sang, et moi j'admirais l'état des lieux.
- Toi et Pauline ? dit Flo en brisant le silence.
- Ouais.
- Depuis quand ?
Il se regardaient maintenant dans les yeux. Si Flo ne m'avait pas autant énervée, j'aurais ris de cette situation. Ils étaient comme deux enfants obligés à s'expliquer après une dispute. Ils craignaient l'un comme l'autre les mots qu'ils devaient utiliser.
- Tu te souviens de ce jour où tu me l'a présentée ?
- Non, admit Flo. C'était quand ?
- On avait seize ans et on devait se rejoindre au terrain de foot, un jour pendant les vacances d'été. Sauf que tu t'es pointé ce jour là avec Pauline, et tu me la présentée.
Flo haussa les soucis, étonné.
- Depuis tout ce temps ?
- Ouais.
- Et tu ne me le dis que maintenant ?
Thibault prit une grande inspiration avant de se jeter dans ses explications.
- Au début, elle avait un copain et tu as tout fait pour qu'il dégage. Soit disant il en avait rien à foutre d'elle. Après, ta mère était très malade alors j'ai pas voulu t'en parler, pour ne pas te déranger. Ensuite, quand tu habitais avec ton frère, tu avais beaucoup changé et on ne se parlait plus trop. Quand tu allais mieux, et que c'était redevenu comme avant, je me suis dis qu'il valait mieux que je l'oublie. Vu la façon dont tu anéantissais les mecs qui s'approchaient trop près d'elle, j'ai commencé à flipper, plaisanta Thibault. En plus, tu étais plus musclé que moi alors je n'ai pas voulu prendre de risques tu vois ! Et puis je ne voulais pas non plus créer des problèmes entre nous. Du coup, j'ai compensé en allant voir d'autres filles. Mais le mois dernier j'ai recroisé Pauline et on a parlé un peu. On s'est revu un soir et on a beaucoup discuté. Je me suis rendu compte que je l'aimais toujours, même après cinq ans.
- Tu es vraiment con, tu le sais ? lança Flo après quelques secondes.
- Autant que toi ? demanda Thibault en souriant, ce qui fit rire Flo.
- Ta gueule !
Ils avaient tout les deux retrouvé le sourire, et Flo avait bien pris l'annonce de Thibault. C'était certain que, comparé à ce que mon copain s'était imaginé, ça paraissait beaucoup moins grave !
- Et sinon, qu'est-ce que tu veux Thibault ? Me demander la permission de sortir avec Pauline ?
L'interpelé lui lança un large sourire arrogant.
- Non. Juste te prévenir que je sortais avec elle. Depuis jeudi.
- Donc j'en déduis que tu n'as plus peur de moi comme tu as dis ?
Un sourire sadique éclaira le visage de mon copain.
- C'est ça !
Ils ont explosé de rire tout les deux et je me détendis immédiatement.
- Tu me dois une table basse, enfoiré.
- Et toi tu me dois trois dents.
- Tu n'avais qu'à pas me chercher…
J'interrompis leur chamailleries :
- C'est bon vous êtes redevenus copains tout les deux ? Plus d'effusion de sang ? demandai-je sérieusement.
Ils me répondirent tout les deux par un hochement de tête.
Thibault est resté pour manger avec nous et on a discuté toute la soirée, après avoir mis les restes de la table basse à la poubelle. Pauline avait l'air d'être une fille bien, d'après ce que j'en avais entendu d'elle. Je ne l'avais jamais vue mais elle avait l'air sympa. Flo lui téléphonait assez souvent et je savais qu'elle était vraiment importante pour lui. J'avais hâte de la rencontrer.
- Bon, je vais vous laisser, déclara Thibault en se levant.
Il serra la main de Flo et me fit un bisou sur la joue.
- Merci chérie. À plus !
- Salut.
Il sortit et Flo fronça les sourcils :
- Il continue de t'appeler chérie ?
- Si tu recommences ta crise de jalousie, je dors sur le canapé cette nuit.
J'allais me lever mais il m'arrêta.
- Si tu veux. Mais je dormirai quand même avec toi.
Il me coucha sur le canapé et s'allongea sur moi.
- Bouge de là tu m'écrases ! protestai-je en le poussant un peu.
- Mais non, répliqua-t-il en souriant.
- Si. Tu es trop lourd.
Il se redressa pour s'asseoir à califourchon sur moi, bloquand mes jambes avec les siennes. Il me regardait, un sourire vicieux collé à ses lèvres.
- Moi je suis lourd ?
- Ouais.
Ses mains approchaient dangereusement mon ventre. J'ai pressentis qu'il voulait me chatouiller alors je l'ai retenu par les poignets.
- Si tu tiens à rester en vie, je te déconseille de faire ça, l'ai-je prévenu sérieusement.
- De faire quoi ? demanda-t-il innocemment.
- Je sais très bien ce que tu t'apprêtes à faire.
- Ah ouais ?
- Oui. Et tu n'y arriveras pas !
Au moment il se dégagea de mon emprise je le poussai sur le côté. Il atterri durement par terre, à l'endroit où il y avait la table basse il y a encore quelques heures, et je me mis sur lui, en lui tenant les mains au dessus de sa tête.
- C'est dingue la force que t'as quand même ! remarqua-t-il amusé
- Impressionné ?