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- Heu… Ouais.
J'ai dis bonsoir à tout le monde et les gars m'ont charié comme quoi je me faisais vieux à être fatigué à à peine vingt deux heures. Non seulement j'étais crevé mais ça me gonflait de voir mon meilleur ami parler à l'oreille de Jess. Je crois qu'il ne va pas tarder à se prendre mon poing dans la gueule.
- Dis-moi ce qu'il se passe Flo, quémanda Jess en sortant du bar.
On était sur la route pour rentrer chez moi. Je tenais sa main et l'air frais me faisait du bien.
- Rien, ça va.
- Pourquoi tu mens ?
- Parce que je n'ai pas envie de me disputer avec toi, avouai-je en soupirant. Pas ce week-end.
Elle me regardait mais j'ignorais ses yeux posés sur moi et continuais de regarder en face de moi.
- Pourquoi on se disputerait ?
Je ne répondis pas.
- Flo.
Je m'arrêtai et la regardai dans les yeux.
- Qu'est-ce qu'il se passe entre toi et Thibault ?
- D'accord. Je comprends où tu voulais en venir. Laisse tomber.
Elle tira mon bras pour continuer d'avancer mais je ne bougeais pas.
- Non. Tout compte fais, je veux en parler. Ça fait deux semaines que tu lui parles par message et je n'ai rien dit depuis la dernière fois qu'on s'est engueulé à propos de ça. Sauf que toi non plus tu ne m'as rien dis et j'attends toujours.
Je commençais déjà à m'énerver. Ça n'augurait rien de bon tout ça…
- Arrête un peu. Je t'ai dis qu'il n'y avait rien. Ce n'est qu'un ami. Et c'est ton ami au cas où tu l'aurais oublié.
Elle accentua sur le mot '' ami '' et ça m'agaçait.
- Et moi je suis ton copain ! m'écriai-je. Pourquoi tu ne me dis rien à moi ?
- Parce que c'est à Thibault de t'en parler. Pas à moi.
Elle lâcha ma main, se retourna et avança.
- Jess ! criai-je. Attends, je n'ai pas finis !
- Moi si.
Je courus pour la rattraper et la tourna face à moi.
- Ça m'énerve de le voir te parler, de te chuchoter je ne sais quoi à l'oreille alors que je suis à côté de vous. Tu sais, si je te dérange quand tu es avec lui, tu devrais me le dire pour que je vous laisse tranquille !
Je hurlais et j'étais en train de devenir fou. C'était du grand n'importe quoi mais je n'arrivais pas à m'en empêcher. Trois gars passaient sur le trottoir d'en face et se sont arrêtés en riant, pour nous regarder. Jess leur jeta un coup d'œil avant de s'adresser à moi en parlant doucement.
- Tu es ridicule, tu le sais ça ? Alors tu vois, là tu me gonfles et oui tu me déranges. Maintenant, je voudrais rentrer, si ça ne te dérange pas.
Qu'est-ce qu'elle m'énervait quand elle était calme alors que moi je m'énervais comme jamais. Je hurlais alors qu'elle, elle se contentait de parler calmement sans hausser le ton. Et ça, ça avait le don de m'agacer encore plus, et le pire c'est qu'elle le savait et qu'elle s'en servait contre moi.
- Arrête avec ça !
- Avec quoi ?
- Fais l'innocente vas-y !
Elle ne répondit pas et je soufflai de rage. Je tournai la tête et vis les trois gars en train de se marrer et de se parler.
- Qu'est-ce qu'il y a ? leur criai-je, ce qui les fit exploser de rire.
- Flo arrête ça suffit.
Elle me tira le bras pour continuer d'avancer mais je n'avais qu'une envie, c'était d'exploser la gueule de ses crétins pour me défouler un bon coup. Je n'aurais peut-être pas dû boire autant. Les verres que j'ai engloutit étaient en train de me monter à la tête. J'ai regardé Jess et j'ai continué d'avancer. Quand j'ai entendu un des gars me crier '' soumis '' j'ai voulu y aller pour leur sauter dessus.
- N'entre pas dans leur jeu. S'il te plaît. Je n'ai pas envie de te voir couvert de sang, déclara-t-elle lassée, comme si cette situation était une habitude.
Je contractai la mâchoire. L'entendre me parler comme ça, comme si j'étais un incapable me vexait terriblement.
- Tu as bien réussis à t'en sortir contre trois gars toi, lui dis-je remarquer.
- Ce n'était pas la même chose. Ils étaient défoncés. Là, c'est toi qui est bourré. Maintenant on rentre.
Elle n'avait pas totalement tort, mais j'étais buté et je campais sur mes positions comme un gamin.
- S'il te plaît Flo… souffla-t-elle.
Elle me prit la main et me tira doucement le bras. J'ai cédé à contrecœur et on s'est éloigné sous les rires de ces imbéciles. On n'a pas parlé durant tout le trajet et c'était mieux ainsi. En rentrant, je me suis déshabillé et me suis couché dans le lit, dos au côté de Jess, sans lui parler. Elle m'a rejoint quelques minutes plus tard et s'est allongée à côté de moi. J'avais tellement envie de me blottir contre elle, mais j'avais trop de fièreté et j'étais beaucoup trop énervé. Elle aussi d'ailleurs puisqu'elle ne m'a pas adressé la parole et ne m'a pas touché. Elle semblait aussi têtue et bornée que moi.
Quand je me suis réveillé, Jess était déjà levée, comme d'habitude. Et toujours comme d'habitude, elle était en train de travailler sur le canapé, avec mon ordinateur. Même si j'étais encore énervé, je ne pouvais m'empêcher de la trouver incroyablement sexy avec mon tee-shirt trop grand pour elle, son chignon décoiffé et ses lunettes sur son nez. J'évitais de trop la regarder parce que sinon j'allais me précipiter pour l'embrasser partout et me coller à elle. Je décidai plutôt de me servir un café et de m'asseoir au bar.
- J'en déduis que tu fais toujours la gueule ? remarqua Jess.
Comme je ne lui répondais pas, elle me rejoignit et se posta à côté de moi. Elle fit pivoter le tabouret pour que je sois face à elle et prit mon visage entre ses mains. Je fermai les yeux pour savourer ce doux contact. C'était moi qui lui faisait ça d'habitude, et ça me faisait bizarre, sans pour autant me déplaire. Au contraire. J'ouvris les yeux lorsqu'elle prit la parole.
- Tu sais, je ne m'excuserai pas pour hier soir parce que je n'ai rien fais de mal.
- Tu fais ce que tu veux.
- Tu ne pourrais pas arrêter de m'en vouloir s'il te plaît ?
Je soupirai en me dégageant de ses mains si douces.
- Je ne t'en veux pas Jess.
- Si tu ne m'en veux pas, alors pourquoi tu me fais toujours la gueule ?
- Je ne te fais pas la gueule. Ce week-end c'est juste… Ce n'est pas le bon moment. C'est tout.
- Comment ça ce n'est pas le bon moment ? demanda-t-elle doucement en reprenant mes mots.
- Rien. Laisse-moi s'il te plaît.
Je me suis levé pour la laisser seule dans le salon et je suis partis dans ma chambre. Je me suis couché sur le dos, un bras replié sur mon visage.
Je me sentais vraiment vulnérable aujourd'hui. Je ne l'étais pas autant les autres années et je pensais alors que Jess y était pour quelque chose. C'était certain. J'avais l'impression d'être devenu beaucoup plus… sensible ces dernières semaines. Et humain, tout simplement. J'éprouvais de très forts sentiments pour Jess, ce qui se répercutait sur tout le reste. En particulier sur aujourd'hui.
- Je peux m'allonger vers toi ? On n'est pas obligé de parler, me rassura la douce voix de celle que j'aimais.
J'enlevai mon bras de mes yeux pour la voir debout près de ma porte. Elle avait lâché ses cheveux et mordillait nerveusement une branche de ses lunettes en attendant ma réponse. Elle était tellement belle.
- Viens, lui soufflai-je.
Elle s'allongea à mes côtés après avoir déposé ses lunettes sur la commode et posa sa tête sur mon torse. Je refermai mon bras autour d'elle. L'odeur de son shampooing et de son parfum m'apaisait et je me sentais déjà mieux. Elle constituait le remède parfait pour m'apaiser en quelques secondes.
Comme elle me l'avait dit, elle n'a pas prononcé un mot et s'est contentée de tracer des lignes imaginaire sur mon ventre. Aussi, je brisai le silence après de très longues minutes.
- Ça fait cinq ans aujourd'hui que ma mère est morte… lui murmurai-je en caressant ses cheveux.
Elle voulut se redresser, mais je resserrai un peu plus ma prise autour d'elle. Je ne voulais pas qu'elle voit les larmes qui commençaient à arriver dans mes yeux. Je n'ai pas pleuré depuis tellement longtemps que je ne savais même plus ce que ça faisait. La dernière personne à m'avoir vu pleurer était ma mère lors de la mort de mon chien quand j'avais dix ans. C'était aussi la dernière fois que j'avais pleuré. Je m'étais promis de ne plus le faire. Cependant, le fait qu'elle soit près de moi me rendais plus sensible à un point que je n'aurais jamais imaginé. Je ne voulais pas qu'elle me voit verser la moindre larme. Je ne voulais pas être faible face à elle.
Finalement, elle réussit à se dégager assez pour voir mon visage. Je fermai les yeux très fort pour empêcher mes larmes de couler mais il y en a une que je n'ai pas pu retenir. Elle roula le long de ma tempe pour finir sur mon oreille. J'ai sentis les mains de Jess se poser sur mes joues, son pouce essuyait le bord de mon œil et ses lèvres touchèrent doucement les miennes. Ce baiser était d'une lenteur exquise et apaisante. Elle se recula mais j'ai pris son visage entre mes mains pour l'embrasser à nouveau. J'avais besoin d'elle. Je passai le barrage de ses lèvres et sa langue s'enroula délicieusement autour de la mienne. Mes mains se resserrèrent autour de ses longs cheveux et elle grimpa sur moi, une jambe de chaque côté des miennes. Je me suis assis, Jess sur mes genoux. Mes mains courraient sur ses cuisses pour remonter sur son dos nu et ses doigts se faufilèrent dans mes cheveux. Je m'agrippai de plus en plus fort à elle et elle à moi, comme si notre vie à tout les deux en dépendait. Sa peau, restait douce et chaude, même parcourue d'une multitude de frissons. Mon cœur battait à une vitesse incroyable. Je crois même qu'il était sur le point d'imploser.
- Jess… soufflai-je contre son cou que j'embrassai avidement et avec envie.
Elle bascula la tête en arrière pour me laisser l'embrasser. Un gémissement étouffé sortis de sa bouche ce qui me fit sourire. Je pris son visage pour interrompre cet instant magique. Son regard n'était pas vide comme d'habitude. Il brillait de quelque chose que je n'avais jamais vu auparavant. Je crois bien qu'une lueur de désir éclairait son visage. Son souffle chaud se mêlait au mien. Je détaillais chaque centimètre de son visage. Elle était magnifique. Elle était à moi. Jamais je ne la laisserai partir. Sous aucun prétexte je ne l'abandonnerai. Je lui ai promis, et jamais je ne romperai pas cette promesse.